Commençons par quelques généralités !
Objectif pédagogique : Acquérir les notions de bases concernant les opiacés, l’héroïne et les critères diagnostiques de l’addiction.
Généralités sur les opiacés
Que sont les opiacés ?
Les opiacés regroupent les substances isolées de Papaver somniferum (morphine, codéine, thébaïne) et leurs dérivés hémi synthétiques (buprénorphine, oxycodone…).
Leur produit de référence est la morphine, à partir de laquelle est produite l’héroïne (ou diacétylmorphine).
Que sont les opioïdes ?
Les opioïdes regroupent les substances naturelles ou de synthèse ayant des effets analogues aux opiacés (méthadone, fentanyl, tramadol…).
Les opioïdes rencontrés en France ont différents statuts selon leur utilisation :
- les substances illicites qui sont produites clandestinement à partir du pavot, à l’instar de l’héroïne, ou achetées illégalement sur internet, comme les nouveaux opioïdes de synthèse.
- les médicaments opioïdes, quant à eux, sont produits légalement par des laboratoires pharmaceutiques. Les deux indications majeures des opioïdes forts sont le traitement des douleurs intenses et/ou rebelles aux autres antalgiques de niveau plus faible et les médicaments de substitution aux opioïdes. Pour les opioïdes faibles (tramadol, codéine, opium, et associations), les indications sont le traitement des douleurs d’intensité modérée à sévère voire légère à modérée.
Quel est le mécanisme d’action des opiacés/opioïdes ?
Ils agissent sur les récepteurs des « opiacés », appelés récepteurs mu (µ), kappa (κ) et delta (d) opioïdes qui sont localisés dans diverses zones du système nerveux central et qui vont avoir des effets plus ou moins différents.
On distingue pour les opioïdes :
- les agonistes entiers, qui ont une activité comparable aux opiacés (ex : la méthadone) ;
- les agonistes/antagonistes, par exemple la buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs μ et antagoniste des récepteurs κ ;
- les antagonistes comme la naloxone et la naltrexone qui vont bloquer les trois types de récepteurs.
Quels sont les principaux risques sanitaires liés aux opioïdes en France ?
Les principaux risques sanitaires liés aux opioïdes sont :
- d’une part des risques addictifs (dépendance physique qui se traduit par une tolérance et un syndrome de sevrage à l’arrêt) et un risque de troubles de l’usage, qui peuvent durer des années ;
- d’autre part des risques toxiques, tels que les surdoses (intoxications), qui entrainent une dépression respiratoire, un coma voire un décès. De plus, la prise d’opioïdes peut entrainer un risque lié à la conduite automobile, un risque de chute chez le sujet âgé, des apnées centrales, des troubles cognitifs, etc.
Généralités sur l’héroïne
Comment est utilisée l’héroïne ? Quels sont les effets recherchés ?
L’héroïne (ou diacétylmorphine) est un dérivé de la morphine qui se présente sous forme de poudre blanche (sous forme de sel) ou marron (sous forme moléculaire) et peut être injectée en intraveineuse, sniffée ou fumée en « chassant le dragon ».
Les propriétés pharmacologiques de l’héroïne, substance sédative, sont comparables à celles de la morphine mais elle agit plus vite, plus intensément et plus brièvement.
L’héroïne provoque l’apaisement, l’euphorie et une sensation d’extase.
Existe-t-il un risque de dépendance lié à la consommation d’héroïne ?
OUI ! La consommation d’héroïne induit rapidement une forte dépendance.
Quels sont les effets néfastes de la consommation d’héroïne ?
Après les sensations d’apaisement, d’euphorie et d’extase, la consommation d’héroïne provoque une sensation de somnolence, parfois des nausées, des vertiges et un ralentissement cardiaque.
Avec la répétition des consommations, la tolérance au produit s’installe. Le consommateur cherche alors à augmenter la fréquence et les doses pour combler cet état de manque et retrouver les sensations ressenties lors des premières prises.
L’absorption d’une dose trop importante d’héroïne ou d’autres opioïdes (surdose) provoque une dépression respiratoire souvent mortelle. Le risque est encore accru lorsque la consommation de cette substance est associée à la prise d’alcool ou de benzodiazépines.
La consommation par voie injectable expose à des abcès et à des risques de contamination par le VIH, VHC et VHB.
Généralités sur l’addiction
Qu’est-ce que l’addiction ?
Le National Institute of Drug Abuse la définit comme une affection cérébrale chronique, récidivante, caractérisée par la recherche et l’usage compulsifs de drogue, malgré la connaissance de ses conséquences nocives.
Quels sont les critères diagnostiques de l’addiction ?
Il existe 2 grandes classifications utilisées par le monde médical pour établir le diagnostic :
> Les 11 critères diagnostiques du DSM V de l’American Psychiatric Association
- Besoin impérieux et irrépressible de consommer la substance ou de jouer (craving)
- Perte de contrôle sur la quantité et le temps dédié à la prise de substance ou au jeu
- Beaucoup de temps consacré à la recherche de substances ou au jeu
- Augmentation de la tolérance au produit addictif
- Présence d’un syndrome de sevrage, c’est-à-dire de l’ensemble des symptômes provoqués par l’arrêt brutal de la consommation ou du jeu
- Incapacité de remplir des obligations importantes
- Usage même lorsqu’il y a un risque physique
- Problèmes personnels ou sociaux
- Désir ou efforts persistants pour diminuer les doses ou l’activité
- Activités réduites au profit de la consommation ou du jeu
- Poursuite de la consommation malgré les dégâts physiques ou psychologiques
Présence de 2 à 3 critères : addiction faible
Présence de 4 à 5 critères : addiction modérée
Présence de 6 critères ou plus : addiction sévère
> Les 6 critères de la dépendance de la Classification Statistique internationale des maladies de l’OMS (CIM 10)
Pour faire ce diagnostic, au moins 3 des manifestations suivantes doivent avoir été présentes en même temps, au cours de la dernière année :
- Un désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance psychoactive ;
- Difficultés à contrôler l’utilisation de la substance (début ou interruption de la consommation ou niveaux d’utilisation) ;
- Syndrome de sevrage physiologique quand le sujet diminue ou arrête la consommation d’une substance psychoactive, comme en témoignent la survenue d’un syndrome de sevrage caractéristique de la substance ou l’utilisation de la même substance (ou d’une substance apparentée) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage ;
- Mise en évidence d’une tolérance aux effets de la substance psychoactive : le sujet a besoin d’une quantité plus importante de la substance pour obtenir l’effet désiré ;
- Abandon progressif d’autres sources de plaisir et d’intérêts au profit de l’utilisation de la substance psychoactive, et augmentation du temps passé à se procurer la substance, la consommer, ou récupérer de ses effets ;
- Poursuite de la consommation de la substance malgré ces conséquences manifestement nocives. On doit s’efforcer de préciser si le sujet était au courant, ou s’il aurait dû être au courant, de la nature et de la gravité des conséquences nocives.
Qu’est-ce que le sevrage ?
C’est l’arrêt prévu ou accidentel chez une personne dépendante de sa consommation d’une ou plusieurs substances psycho-actives. Cet arrêt est susceptible d’induire un symptôme de manque ou de sevrage qui nécessite des soins médicalisés.
Sources
Héroïnes et autres opioïdes – Agnès Cadet-Taïrou, Thomas Néfau, Éric Janssen – Publication de l’OFDT 2019
Bon usage des antalgiques opioïdes : Prévention et prise en charge du mésusage et des surdoses d’opioïdes – HAS 2022
Opiacés et cerveau 2021 – Brigitte Kieffer
Drogues.gouv.fr – « Qu’est-ce qu’une addiction ? »